jeu. Déc 5th, 2024

De temps en temps, un État peut-il actionner quelques leviers pour juguler l’inflation ? À cette vieille question d’examen d’économie politique, un « candidat » appelé l’État français croit maintenant pouvoir répondre « oui ». Ou du moins, il croit pouvoir le faire pour certains produits alimentaires de base qui se trouvent dans le caddie de la quasi-totalité des Français, comme les pâtes, les autres produits céréaliers, l’huile, la volaille. Pour les consommateurs transalpins, « harcelés » depuis un an par une hausse historique de 14% des prix alimentaires, le soupir de soulagement devrait intervenir dès le début du mois de juillet, si l’on en croit ce que vient de promettre le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, qui assure qu’il ne s’agira pas seulement d’ajustements cosmétiques temporaires, mais du début d’un véritable changement de tendance destiné à s’accentuer dans les mois suivants, surtout si les récoltes à venir sont à la hauteur des prévisions dans les grands pays exportateurs tels que le Canada.

Pas moins de soixante-quinze groupes, souvent des multinationales du secteur, ont accepté de s’asseoir autour d’une table avec le patron de Bercy, s’engageant à procéder à des réductions lorsque le coût des matières premières aura à nouveau baissé d’au moins 20 % depuis mars dernier. Une sorte de « rupture » positive par rapport aux règles habituelles assez rigides de la négociation des prix en France, où il existe un calendrier légal de trois mois d’hiver pour fixer les points d’accord entre industriels et grande distribution sur chaque catégorie de produits, valables ensuite pour une année entière. « Nous contrôlerons et sanctionnerons ceux qui ne respectent pas les règles », a également promis M. Le Maire, sur cette question qui est devenue la première priorité des Français, et donc l’objet de nombreuses promesses politiques, même de la part de l’opposition. Les produits concernés sont généralement ceux dont les prix sont déjà en baisse sur les marchés de gros.

Dans un pays où une grande partie de l’alimentation tourne autour des produits laitiers et de la viande, le ministre a souligné que « la volaille va baisser parce que les coûts de production ont baissé », contrairement à la viande bovine et porcine, ou au lait. M. Le Maire a rappelé que son ministère n’a pas de baguette magique pour réguler directement les prix : « Néanmoins, il a un pouvoir d’injonction sur les distributeurs et les industriels pour leur dire de se réunir, de s’entendre et de faire baisser les prix. Pour les contrevenants qui continueraient à augmenter leurs marges bénéficiaires de manière injustifiée, le ministre dit s’apprêter à divulguer les noms. Plus sévère encore, Le Maire menace également de recourir à « une taxe sur les marges bénéficiaires excessives ». Pour Bercy, qui veut débloquer ses inspecteurs anti-fraude pour effectuer des contrôles dans les supermarchés, les hausses de prix enregistrées l’an dernier ont déjà permis à presque tout le monde de rattraper les difficultés rencontrées au cours des deux années précédentes.

L’accord est également lié à la législation sur les bénéfices spéciaux introduite en deux étapes, entre 2018 et 2021, d’abord principalement pour protéger les revenus des petits agriculteurs et éleveurs, trop souvent « écrasés » par le pouvoir de négociation de l’industrie agroalimentaire et des chaînes de supermarchés. Théoriquement, les effets de ces discussions entre gouvernement et producteurs devraient s’ajouter au « trimestre anti-inflation », une initiative des cinq grandes chaînes de supermarchés qui se sont engagées à vendre au « prix le plus bas possible » une sélection de produits de première nécessité, reconnaissables à un logo tricolore, entre le 15 mars et le 15 juin. Un trimestre que les distributeurs s’engagent aujourd’hui à prolonger jusqu’en décembre. Mais à ce sujet, la principale association de consommateurs, l’Ufc, s’est interrogée sur l’impact réel de la mesure, en publiant une étude montrant qu’une seule enseigne de supermarché a pour l’instant légèrement ajusté les prix réels sur une centaine de produits. Une mise en garde, donc, également pour le nouveau dispositif sur les fabricants.

By Nermond

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