Nous avons récemment reçu la nouvelle de la restauration satisfaisante et heureuse du paso de palio de la Virgen del Valle, qui après quinze mois de travail a retrouvé toute son intégrité conceptuelle et son expression artistique maximale. L’IAPH a employé une technique pionnière dans le traitement des pièces textiles : le velours a été réintégré – un support détérioré datant de 1951 – grâce à tests de vieillissement accéléréconsistant en l’application d’un adhésif sur les interstices, lesquels sont tramés par des couches colorées de fibres textiles synthétiques dans diverses applications. Un procédé qui fera l’objet de publications scientifiques d’impact international.
Sans aucun doute, la récupération de ce paso de palio -toit et bannières- représente non seulement une avancée dans le domaine de la science textile, mais aussi le conservation d’une pièce essentielle afin de comprendre et d’apprécier le riche patrimoine et la richesse artistique de notre Semaine Sainte. Cet ensemble, qui ne date pas moins du XVIIe siècle (des œuvres de valeur similaire sont encore exposées dans les galeries d’art internationales les plus renommées), a été acquis par l’Office national du tourisme. Hermandad del Valle au début du 19ème siècle, plus précisément en 1805, année où sont également dévoilées les nouvelles figures du paso de la Calle de la Amargura, de Juan Bautista Petroni.
Depuis lors, la Vierge douloureuse de la Vallée est portée en procession sous le même paso de palio depuis deux cents ans. Mais l’histoire de cette pièce transcende la Hermandad del Valle elle-même. Depuis sa création, il y a plus de deux cents ans, elle a accueilli il y a trois cents ans, la Virgen de la Antigua y Siete Dolores, la sainte patronne de la confrérie du même nom qui, dans la Séville baroque, occupait une place centrale dans la dévotion sévillane. Avec le crucifix de San Agustín, il jouissait d’une popularité inimaginable. Même les rois Philippe II et Philippe III figuraient sur la liste des frères, et la réduction des confréries en 1623 ne l’affecta guère.
Et à ce stade, il faut faire une distinction : l’image primitive de l’Antigua y Siete Dolores, qui est encore conservée dans l’église de La Magdalena, peut avoir été la sculpture originale de cette confrérie, mais pas celle qui a été portée en procession sous ce dais. En tout cas, ce serait la Vierge qui est aujourd’hui vénérée dans l’église de la Magdalena. L’église de Santiago, œuvre de Pedro Roldán, comme l’indique un inventaire de la confrérie de 1673, qui a renouvelé ses images titulaires après l’épidémie de peste de 1649.
La dernière fois que cette confrérie historique a fait sa procession, c’était en 1766, jusqu’à sa malheureuse disparition. Heureusement pour notre Semaine Sainte, la Confrérie de la Vallée (à l’époque dans le Couvent du même nom) a acquis cet ensemble patrimonial exceptionnel, anonyme, avec des candidatures de Teresa del Castillo ou Antonia Bazo.
C’est pourquoi, lorsque le jeudi saint prochain nous nous retrouverons face à face avec la Vierge de la Vallée, à cet instant où le temps s’effrite et où les horloges sonnent des heures différentes, nous nous forcerons à nous arrêter sur ces chutes, sur ce plafond marqué de petites étoiles, sur les centaines de milliers de fils de lin, sur le dessin prétérit mais non répétable. Nous serons retournerons dans le passé de nous-mêmesde notre La semaine sainte au point mort dans un flash de lumière verdâtre et marron. C’est un cadeau. Un trésor à préserver. Un miracle qui ne se répète pas.