L’épargne d’abord. Les Italiens ne se sont pas laissés décourager par deux années d’inflation élevée et ont continué, peut-être en réduisant leur consommation, à faire ce qu’ils ont toujours fait : mettre quelque chose de côté par crainte de temps plus difficiles. Les données de l‘enquête d’Intesa Sanpaolo et du Centro Einaudi présentée ce matin, sur « L’épargne et les choix financiers des Italiens en 2023 ». montre que la situation s’est améliorée par rapport à l’année dernière. L’étude a analysé l’impact de l’inflation sur le comportement des épargnants et ses effets sur le revenu, la consommation, la liquidité et les choix concrets en matière d’investissement et d’endettement.
La présentation a été suivie par Gregorio De Felice (économiste en chef de la Banque), Beppe Facchetti et Giuseppe Russo (respectivement président et directeur du Centro Einaudi) et Umberto Filotto (professeur d’économie à l’université de Tor Vergata et président de la FEduF).
En 2024, l’inflation est de 1,8 % en Italie. Les perspectives pour 2024 sont celles d’un retour à la normale. « Les banques centrales ont gagné leur bataille dans la lutte contre l’inflation », a commenté M. De Felice, « elles ont influencé la composante intérieure de l’inflation. Elles ont évité les effets de second tour sur la propagation de l’inflation, et la restriction de la demande a calmé les prix des matières premières énergétiques ». En ce qui concerne la zone euro, les estimations d’Intesa indiquent un ralentissement de l’inflation à la consommation de 5,4 % à la fin de 2023 à 2,3 % en décembre de l’année prochaine, suivi d’une stabilisation autour du seuil de 2 % à partir du début de 2025. En ce qui concerne l’Italie, l’inflation devrait tomber à 1,8 % en 2024, contre 5,9 % pour l’année en cours.
54,7 % des ménages épargnent . Si l’on revient à l’enquête, on constate que 95 % des ménages déclarent être financièrement indépendants, contre 93 % dans l’enquête de 2022, ce qui confirme que (malgré le scénario difficile) l’autonomie de revenu perdure. La part des ménages parvenant à épargner atteint des sommets prépandémiques (54,7 % contre 53,5 % en 2022). Le pourcentage moyen du revenu épargné augmente également (12,6 %, contre 11,5 % en 2022). Parmi les raisons d’épargner, le logement (30 %) et les enfants (16 %) se distinguent ; seuls 5 % déclarent avoir mis des ressources de côté pour faire face à l’augmentation des prix. Pour un tiers de l’échantillon, l’épargne est « de précaution », c’est-à-dire sans intention particulière. En revanche, le nombre de ménages en situation de fragilité financière est préoccupant : si une dépense imprévue de 5.000 euros survenait, seuls 37 % disposeraient de disponibilités immédiates pour y faire face.
La richesse reste sur le compte courant. Les Italiens ont décidément échoué en matière d’éducation financière. Seuls 38 % de l’échantillon sont capables de donner une définition correcte de l’inflation : plus d’un quart la confond avec le niveau des prix, certains avec la dépréciation de la monnaie. Depuis les années 1980, aucune vague inflationniste n’a été aussi importante, mais elle n’a pas entraîné de changement radical dans la gestion des ressources économiques. La part de la richesse détenue sous forme liquide atteindra 48 % en 2023, contre 44 % en 2022. Et le paradoxe est que la liquidité est considérée par beaucoup comme une arme de défense contre l’inflation.
Investisseurs prudents, bons pour les obligations. En matière d’investissement, la sécurité conserve sa première place. L’utilisation des obligations progresse, choisie par un quart de l’échantillon, tandis que l’épargne gérée recule (-15%). La bourse reste une « zone de non-droit », avec seulement 4,2 % de l’échantillon ayant acheté des actions au cours des 12 derniers mois. Dans le domaine des investissements alternatifs, l’or (qui intéresse 23 % des répondants) et les fonds éthiques ESG (13 %) dominent.
La brique est une valeur refuge, mais en dehors des prêts hypothécaires, les Italiens ne s’endettent pas. Dans un contexte de forte inflation, la brique et les hypothèques continuent d’être considérées comme le meilleur investissement : le patrimoine immobilier des Italiens est important et l’enquête l’estime à près de 4 000 milliards d’euros pour la seule première maison, soit plus du double du PIB. Le marché immobilier est toujours convoité par les Italiens mais moins accessible aux jeunes. Cependant, le crédit immobilier semble encore soutenable : pour seulement 8,2 % des personnes interrogées, il atteint le seuil critique d’un tiers du revenu annuel net de la famille. Il n’est pas dans l’ADN des Italiens de s’endetter pour la consommation courante : en 2023, seuls 9,8 % de l’échantillon déclarent avoir un prêt à tempérament, tandis que 3,3 % seulement remboursent plus d’une mensualité.