Le cri d’alarme a été lancé il y a quelques jours par des commerçants confrontés au paradoxe de températures printanières en plein automne. Coupe-vent, pulls et bottes sont parqués dans les rayons et le risque est que les familles, confrontées à une perte dramatique de pouvoir d’achat, reportent leurs achats directement en janvier pour dépenser moins. La fédération des magasins d’habillement Confesercenti (Fismo) a proposé de repousser les soldes d’un mois, en les déplaçant à la première semaine de février. Le changement climatique, avec ses saisons imprévisibles, est la goutte d’eau qui risque de faire déborder le vase déjà plein de problèmes critiques tels que la course aux prix et l’avancée du commerce électronique. Un scénario complexe qui met les commerces traditionnels en crise : en 2023, il n’y aura plus que 2167 nouveaux commerces, soit moins de la moitié de ceux qui ont ouvert il y a dix ans. D’où la demande, dans une lettre adressée la semaine dernière au président de la Conférence État-Régions, Massimo Fedriga, de mesures appropriées telles que le report des soldes de manière « systématique », tant en hiver qu’en été, afin qu’elles soient réellement « de fin de saison », et un régime fiscal facilité pour les petits commerces de proximité dont le chiffre d’affaires est inférieur à 400 000 euros.
La donnée de départ dramatique confirmée par Confcommercio est la chute drastique des achats en magasin. On parle d’un effondrement de 30% au cours des deux premières semaines d’octobre par rapport à l’année dernière. Un phénomène dicté par les températures encore élevées, surtout dans le Centre-Sud, mais surtout par l’érosion de la consommation qui touche tous les secteurs, mais particulièrement celui de l’habillement et des accessoires. L’Istat parle d’une contraction de 10 % au troisième trimestre. « Faire avancer les ventes est une réaction instinctive, un sujet très ressenti par la base, mais la question est si complexe qu’elle mérite une analyse approfondie des variables du terrain. » souligne Giulio Felloni, président de Federmoda. La fédération Confcommercio a mis en place un comité de 13 personnes qui rassemblera les évaluations faites au niveau territorial et prendra ensuite une décision unifiée. « Au-delà des questions climatiques, des règles précises doivent être fixées. Le gouvernement a par exemple écouté notre proposition d’aligner la date de début des soldes d’été, une mesure que nous jugeons essentielle pour éviter le « tourisme d’achat ». Le vrai problème, selon M. Felloni, est la relation avec les fournisseurs, c’est-à-dire les entreprises de mode, et le passage aux achats en ligne, qui est favorisé par l’absence de règles homogènes.
Pour Mario Resca président de Confimprese, Le report des soldes n’est pas une mesure décisive. « Les petits magasins achètent à des grossistes, les grandes chaînes achètent directement aux producteurs avec des commandes passées au moins six mois à l’avance ». Le changement climatique pose des problèmes à l’échelle mondiale qui ne peuvent être résolus, selon Resca, qu’en s’appuyant sur une production « juste à temps » pour fournir les produits vendus.
« La frontière entre les ventes, qui ne peuvent avoir lieu qu’à certains moments, et les ventes promotionnelles est très floue et, pour le consommateur, elle n’est pas pertinente. Pour les magasins physiques, les revenus risquent d’être réduits au minimum en raison de la concurrence de l’online, qui n’a pas de coûts à supporter », souligne le président de Federmoda. Une concurrence anormale, de plus en plus féroce avec des phénomènes coutumiers comme le Black Friday de fin novembre qui font désormais partie des habitudes d’achat, qui risque également d’avoir pour effet secondaire la désertification des centres historiques. « Il ne s’agit pas seulement d’une question de tourisme mais précisément de faire vivre les villes car les commerces de proximité sont une valeur ajoutée pour les citoyens mais aussi pour les marques puisque les vitrines sont de la publicité gratuite », conclut M. Felloni. Un raisonnement également partagé par Confesercenti. « Les commerces de proximité – explique Benny Campobasso, président de Fismo – sont désavantagés par rapport aux grands détaillants et surtout aux plateformes qui réalisent des économies d’échelle leur permettant de vendre à des prix très compétitifs, en s’appuyant sur des coûts de personnel et d’infrastructure réduits et sur l’absence d’un régime fiscal uniforme entre le commerce physique et le commerce en ligne ».