ven. Juil 26th, 2024

Le 14 juin 1903 est né Pasquale Saraceno économiste, protagoniste crucial de l’Italie d’après-guerre et l’un des fondateurs du Svimez (Association pour le développement de l’industrie dans le sud de l’Italie). Avec l’actuel président Adriano Giannola  nous parlons des défis pour l’avenir, qui seront discutés lors d’une conférence le 21 juin.

L’association a-t-elle encore un sens ? 
Je crois que oui. Après tout – sans rhétorique – le Svimez est né en 1946 sur le présage-défi de Mazzini : « L’Italie sera ce que sera le Mezzogiorno ». Il ne s’agit pas de l’adhésion à un slogan, mais de la conclusion et du partage d’une analyse qui conclut la confrontation entre Saraceno (Iri) et Morandi (Fln AltaItlia) lors de leur rencontre à Milan en 1945. Une sorte de prophétie qui, à partir de l’Unité, a une signification précise pour des personnalités bien choisies. Parmi les nombreux illustres : De Viti De Marco, Dorso, Pescatore, Rossi-Doria. Le Svimez promeut une série d’initiatives visant à rappeler la figure de Pasquale Saraceno, ses études et ses réalisations, parmi lesquelles : le Code Camaldoli ; le Plan des Premiers Secours, base de l’utilisation des ressources du Plan Marshall pour la reconstruction italienne ; la naissance de la Cassa del Mezzogiorno et du Protocole sur le Mezzogiorno annexé au Traité de Rome, qui, en initiant l’industrialisation du Sud, a rendu l’industrie du Nord compétitive et performante dans la Mec. Tout cela pour rappeler, à une époque où l’attention la plus grande est portée sur les fractures territoriales, son action pour soutenir le développement productif – et non pas social – du Mezzogiorno et pour valoriser sa mémoire, en la protégeant et en la promouvant surtout auprès des jeunes générations.

Comment le Sud a-t-il changé, en bien ou en mal, par rapport à la période d’après-guerre ? 
Malheureusement, les régions du Sud vivent et surtout « gèrent » depuis la fin des années 1990 une sorte de malédiction et de ghettoïsation qui les a confinées dans la logique contestable de politiques de cohésion qui n’ont pas grand-chose à voir avec les règles et les principes des politiques de développement. Le Mezzogiorno est vivant, dynamique. Mais dès qu’il y a des signes de renaissance, les talents sont obligés d’émigrer ailleurs pour se faire entendre et se rendre crédibles.

Le PNR peut-il vraiment relancer les régions méridionales ?
 Je l’espère si l’on garde à l’esprit qu’il s’agit d’un plan national. Il ne s’agit pas seulement d’une question de ressources, mais d’un changement de mentalité. Et j’entends par là surtout le gouvernement central, qui a pris pour acquis que la qualité des périphéries ne suffirait pas à modifier le cours négatif de l’inertie. Au niveau décentralisé, il est devenu évident que les municipalités du sud ont du mal à présenter des projets dans les domaines de l’éducation et de la mobilité. Cela est dû en partie à un manque de techniciens et en partie à une difficulté à attirer les investissements. Il est toutefois grave que le gouvernement ainsi que les universités, le CNR et d’autres organismes qui, dans leurs statuts, considèrent comme une « troisième mission » l’entretien du territoire, semblent ignorer le concept de subsidiarité envisagé par les articles 118 et 120 de la Constitution. La nécessité d’une direction active du gouvernement central devrait être évidente, mais au lieu de cela, il se dérobe à ses responsabilités pour se tailler – par idéologie – un simple rôle d’arbitre.

De quoi l’économie et la société du Sud ont-elles besoin ? 
Pour former la classe dirigeante, il faut revenir au modèle de la Basilicate. Lorsque, dans les années 1970, les fonctionnaires régionaux ont quitté la Lucanie en direction de Bruxelles pour apprendre à rédiger des projets européens afin d’obtenir des fonds. Il est urgent de retrouver une capacité stratégique, une logique de système et une volonté de changement de cap. Sinon, si le Sud ne se développe pas, le reste de l’Italie ne le fera pas non plus.

Sur quoi le gouvernement et les autorités locales doivent-ils se concentrer : le tourisme, l’industrie, l’agriculture, le secteur tertiaire ?  Le Sud a de grandes opportunités dans tous les secteurs, surtout dans cette phase de transition énergétique et numérique. Tout d’abord, il est nécessaire que tout cela soit structuré dans un véritable plan de travail au sens productif, apportant ainsi une contribution fondamentale et irremplaçable aux possibilités de redressement du système national. Il ne s’agit pas seulement de former et d’attirer des talents. La logistique peut jouer un rôle important pour l’ensemble de l’Europe. Avec les autoroutes de la mer et le pont du détroit, nous pouvons jouer des cartes importantes : mais nous avons besoin de services adéquats pour faire de l’Italie le système logistique de l’UE.

Les jeunes méridionaux continuent de fuir. Que fait-on pour arrêter cette nouvelle émigration ?
 C’est très bien de choisir de se former au Nord ou à l’étranger, mais encore faut-il que les conditions soient réunies pour pouvoir revenir et contribuer à améliorer leur terre : ce n’est pas une rhétorique que le Sud donne le meilleur de lui-même, mais ne reçoit souvent rien en retour. C’est pourquoi il est absolument prioritaire aujourd’hui d’élaborer une stratégie : un plan de renaissance, pas de récupération, encore moins de résilience. Si le PNR se réduit à l’entretien d’un luxe intelligent et vert, l’Italie aura échoué. Pour éviter cela, l’expérience exemplaire du « miracle » des années 1960 vient à la rescousse. Pour la première fois depuis l’unification, l’engagement pris dans la Constitution républicaine de 1947, inscrit en toutes lettres dans l’article 119, a commencé à être respecté. Cet engagement a été annulé en 2001 par le texte « réformé » du « nouveau » 119.

By Nermond

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